Les prédefs de Drago

Originaire du village de Wenshaveye, Elain est née au sein d’une famille nombreuse et attachée aux traditions. Plus d’un de ses nombreux cousins est devenu doneigad. Elain n’a pourtant pas suivi cette voie-là. Elle a préféré se faire commerçante, et sa première idée - vendre quelques baumes des célèbres soigneurs de Wenshaveye - a été couronnée de succès. Elle fait maintenant partie de ces quelques Natifs marchands qui vont de village en village, et c’est assez tôt qu’elle a été confrontée aux étrangers… ou du moins à ce qu’ils laissaient derrière eux.
Car Elain a trouvé de véritables trésors dans les campements abandonnés des continentaux. Là où ils passent, Elain est sur leurs traces. Elle revend ensuite ses trouvailles, que ce soit auprès de son peuple pour pas cher ou auprès des étrangers eux-mêmes. Elle a même déjà fait racheter ses propres bottes à un étranger étourdi.
Mais récemment, la situation s’est tendue et Elain doit être sur ses gardes. C’est mauvais pour le commerce, et la Native se trouve des tas d’idées en commun avec Odran. Cependant, quasiment toute sa famille soutient, quoi que passivement, Treasa et Elain a été élevée dans le respect de la tradition. Elle craint de devoir couper quelques ponts si elle venait à prendre une décision, d’un côté ou de l’autre. Pourtant son avis aurait du poids : non contente de vendre, Elain est également une source de nouvelles quand elle passe dans un village. On lui fait confiance et elle a une forme d’influence.

Elain est une opportuniste. Elle n'a jamais tenu en place et plus d'un membre de son clan lui prédisait une vie de déceptions, car Elain semblait toujours insatisfaite de ce qu'elle avait.  C’est en discutant avec des Natifs d’autres clans, venus en quête des soigneurs les plus réputés de l’île, qu’Elain a réalisé qu’elle n’était pas obligée de rester coincée à Wenshaveye toute sa vie. Elle n'était pas dans l'ombre de sa fratrie, elle pouvait faire de sa situation un avantage.  Voyager et commercer lui apportent beaucoup de satisfaction ; elle n’est jamais si heureuse que quand elle réussit à revendre cher un objet trouvé dans un campement abandonné.
Que sa famille s’intéresse aussi peu aux étrangers la dépasse, et Elain leur parle de moins en moins de ses trouvailles et de ses rencontres. Ses proches ne comprennent peut-être pas grand-chose à ses occupations, mais reste qu’ils sont bien contents quand elle ramène des ressources à la maison.

Abel est originaire de Vendergarten. Son enfance a le goût de l’exil ; il n’a jamais pu rester au même endroit très longtemps. La majorité de son entourage étant engagé dans la garde, Abel a suivi sur les chemins de leurs campagnes et de leurs affectations. Il a été élevé par les prostitués, en communauté, et il a très vite dû travailler à de petites tâches comme apporter l’eau, le pain, faire le ménage, pour sécuriser sa place.
Depuis qu’il a entendu parler de Teer Fradee, Abel est obsédé par l’idée de s’y rendre, de goûter l’air pur, d’être loin de la maladie et de la guerre qui ont emporté son foyer. Abel n’avait guère les moyens de s’y rendre, avoir la langue bien pendue n’étant pas suffisant pour lui acheter le ticket. Mais voilà, depuis l’enfance on lui répétait qu’il avait au moins une chose à lui : une belle gueule. Il a donc choisi de s’engager lui-même dans les affaires et a rejoint les premiers travailleurs des sous-sols de la taverne de Nouvelle-Sérène qui était à l’époque, voilà 5 ans, rien de plus que quelques planches sur une terre boueuse. Les conditions de vie ne sont toujours pas le grand luxe mais Abel s’y est fait. Il est là où il désirait être et espère avoir quitté le métier dans peu de temps dès qu’il se sera fait suffisamment d’argent. Sa clientèle a tendance à être composée d’hommes et de femmes d’un certain âge, prompts à chercher écoute et réconfort. Abel aime garder les choses ainsi, en tant que pionnier dans la taverne il a sa propre chambre, et certains clients sont chasse gardée : ils paient trop bien pour qu’il puisse s’en passer. Cela l’oblige à toujours cultiver son image, choisir son ton et ses maniérismes avec soin.

Abel possède une grande douceur, mêlée à une mélancolie placide. Cependant, il ne faut pas confondre gentillesse et bêtise. Abel est rusé et n’a pas de mal à se montrer assertif. C’est quelqu’un de fin socialement, doté d’une grande intelligence émotionnelle. Il pose sans mal ses limites et est d’une difficulté frustrante à manipuler. Il a survécu pendant si longtemps qu’il éprouve quelques difficultés à apprendre à vivre. Il n’a guère de rêve ou d’ambition bien définis pour après, quand il pourra quitter son travail actuel.

La famille de Nerva est originaire d’une province de Thélème récemment conquise. Pour le jeune homme, c’est simple : Thélème l’a sauvé. La foi l’a sauvé, de la malichor et de la guerre.
Nerva a le don de magie, maisil n’a pas cherché à entrer dans le clergé - et pourtant il a fait ses études dans l’école d’un ordre religieux qui se fixait pour mission l’enseignement. Non, Nerva a voulu copier ses professeurs, il a même failli rejoindre leurs rangs mais on l’en a détrompé. Son esprit vif et sa soif de savoir seraient mieux utilisés ailleurs. A 19 ans, Nerva a donc été envoyé par la directrice de son institution à la capitale pour travailler parmi les censeurs, dans la section des textes et œuvre historiques. Et à force de lire et critiquer les ouvrages qui allaient ou non obtenir le droit d’être imprimés, Nerva s’est fait la main. Résultat, à 22 ans il a lui-même publié un essai à la fois historique et théologique qui a fait sensation.
Au début, Nerva était simplement excité de l’attention que recevait son écrit. A présent, envoyé sur Teer Fradee, il est nerveux. Il n’a pas réitéré sa prouesse en quatre ans et l’enfant prodige n’en est plus vraiment un. En tant qu’historien et lettré, on attend beaucoup de Nerva. Il est censé mener des fouilles pour retracer le parcours de Saint-Matheus en Eden, et on a donc placé sous sa tutelle un groupe d’archéologues dévoués. Nerva doit leur donner ses instructions alors que lui-même est perdu dans cet environnement nouveau.

Ayant connu le dénuement et le chaos, Nerva ne se sent jamais aussi à l’aise que quand il travaille dans un endroit paisible, confortable, et garni de livres.
Quand il faut néanmoins défendre ses thèses devant un public, c’est une autre histoire. Le jeune homme est timide, et si ses proches le disaient sur un ton attendri quand il avait seize ans, maintenant qu’il en a dix de plus il sent bien que c’est un handicap. Il a toujours trouvé beaucoup d’apaisement dans la prière ; mais cela ne suffit plus. Cercle vicieux, la timidité devient de l’anxiété. S’il ne fait pas rapidement preuve de son aisance en société et de ses compétences sur le terrain, Nerva a l’impression qu’il tombera de haut.

Sesto est issu de la noblesse. Sa famille fait commerce de tissus, qu’elle envoie par la mer aux quatre coins de Gacane. Sesto a eu de bons précepteurs et ses relations avec ses pairs ont toujours été cordiales. Jeune homme sans histoires, Sesto pensait grandir, vivre et mourir à Sérène. Mais c’était avant qu’on ne lui confie sa première mission : surveiller les affaires familiales au port. Un objectif doublement agréable à remplir, grâce à l’air frais… et à la compagnie des Nautes, un plaisir inattendu.
Mais que Sesto s’encanaille avec les Nautes ne plut pas du tout à ses parents. Ces derniers l’envoyèrent donc à l’étranger, escomptant que le jeune homme ne supporterait pas ce bouleversement dans sa vie bien rangée. Mais c’était mal le connaître. Sesto ne dépérit pas, au contraire ; posté au port en tant que négociateur et ambassadeur des affaires familiales, il ne tarda pas à se faire de nouvelles habitudes sur place. Mieux, il remplit son office avec brio.
Sesto finit néanmoins par être rappelé à Nouvelle-Sérène : quelqu’un de sa trempe et proche des Nautes était trop utile par ces temps troublés. Les rapports entre les marins et la Congrégation se tendaient depuis l’installation de l’Alliance du Pont sur Teer Fradee, et un bon négociateur n’était pas de trop. Sesto se chargea donc de réaménager les entrepôts du port et de jouer les intermédiaires entre les Nautes et les familles nobles. Lui-même n’ambitionnait pas particulièrement de rejoindre l’île… jusqu’à ce qu’arrive un courrier de sa cousine préférée, Iris.
Iris vit à Nouvelle-Sérène depuis quelque temps aux côtés de son épouse, une femme de la haute noblesse. Et les nouvelles ne sont pas bonnes. Ni celles sur la santé d’Iris, ni celles sur sa nouvelle cité. Alors Sesto en déduit qu’il faut aller voir par lui-même, et le nombre de contacts qu’il s’est fait au cours de sa petite carrière tranquille lui permet d’obtenir un rôle de diplomate au palais de Nouvelle-Sérène. Voilà maintenant que Sesto a un tout nouveau peuple auprès de qui négocier ; mais il est surtout préoccupé par la situation politique de Nouvelle-Sérène. Il serait dommage que le café dont il vient de s’enticher ne reçoive plus aucun ravitaillement.

Sesto est un homme d’habitudes, qui aime que les choses soient organisées et prévisibles. Ce trait de caractère l’a souvent fait sous-estimer, et les concurrents qui se sont amusés à le pousser dans ses retranchements l’ont vite regretté. Ce n’est pas parce que le diplomate est souriant et bon vivant qu’il n’est pas habile dans sa partie. Sesto mélange aisément le formel et l’informel et a signé plus de contrats au restaurant que dans son bureau.